Apollinaire Le Bas

Samouraï en armure de guerre tenant un arc JAPON Guerrier Japonais (La figure est couverte du Masque de guerre)


Inscription , au dessus et au dessous de la photographie, sur le support

JAPON
Guerre Japonais
(La figure est couverte du Masque de guerrier) 


Commentaire

Ce samouraï a revêtu l'armure sobre d'un guerrier ordinaire. Il est figuré de trois-quarts tenant un arc dans les mains. On note la dissymétrie et la grande taille de l’arc japonais classique. Pour cette série, Le Bas a partiellement repeint les épreuves originales avant d'effectuer des contretypes. Ici, après avoir effacé l’arrière-plan il a ajouté une pagode qui semble avoir été posée là pour donner une touche d'exotisme japonisant.

En fait, Le Bas a dessiné un bâtiment qu'il a recopié d'une autre de ses photographies 1 . Il s'agit du bâtiment des officiers de la douane de Shimonoseki que l'on aperçoit, exactement avec la même perspective, à droite du sanctuaire Kameyama Hachiman-gū dans une épreuve ultérieure de cet album (cf. épreuve no 20, 21947).

Encore une fois, ce « clin d'œil » à l'expédition de Shimonoseki est réservé aux initiés. Le Bas a sans doute voulu évoquer les combats du 6 septembre où quelques guerriers du fief de Chōshū avaient effectivement combattus en armure et même utilisé des arcs comme le signalait le futur diplomate anglais Ernest Satow 2 , et Alfred Roussin, présents pendant la bataille, dans leurs mémoires :

« La résistance de l’ennemi a été insignifiante ; il s’est tenu à distance. Des détachements ont été entrevus, portant quelques pièces de leurs armures de guerre ; peu de coups de fusils sont échangés. Détail archaïque : un soldat anglais blessé d’une flèche : j’en ramasse quelques unes éparses sur le terrain. 3  »

Notons qu'ultérieurement, côté anglais, les fusiliers-marins eurent à faire face à une forte résistance et perdirent, par excès de confiance, plusieurs dizaines d'hommes dans l'attaque de l'après-midi.

Autant la pose du daimyō était majestueuse, autant les poses de ce samouraï (ou d'un modèle revêtu d'une armure) semblent un peu maladroites et trop « posées » avec ce modèle qui tient son arc avec une flèche dans une main et agrippe la garde de son katana de l'autre…

Notes

1. C'est Thomas Kesteloot qui a le premier noté cette étrange emprunt. Cf. KESTELOOT Thomas, L’album de photographies de Jules Félix Apollinaire Le Bas conservé au musée Guimet : le rare témoignage d’un photographe méconnu, Mémoire d'étude (1re année de 2e cycle), sous la direction de Mme Dominique de Font-Reaulx, Paris, École du Louvre, 2015, p. 45.

2. Sir Ernest Satow (1843-1929) était alors un jeune interprète au service de l’amiral britannique Sir Augustus Leopold Kuper à bord du navire HMS Euryalus. Il relate ces événements dans A Diplomat in Japan, publié en 1868. Pendant l’engagement du 5 septembre, Satow était accompagné de Felice Beato. Il note que l’armement des Japonais était très hétérogène. Satow et Beato, après avoir essuyé des tirs de fusil et de canon, aperçoivent des Japonais en « black armour and white surcoats » et passent devant le corps d’un marin anglais tué par une flèche.
Cf. ESTEBE Claude, Le Regard de l’Occident et les premiers photographes japonais 1860-1900. Étude basée sur les collections de la BNF, sous la direction de M. Jean-Jacques Origas, D.E.A de langue et civilisation japonaises, INALCO, 1999, p. 33.

3. Cf. POLAK Christian, Lys et Canon, Images et correspondances retrouvées (1860-1900), Tōkyō, Chambre de commerce et d'industrie française du Japon, 2013, p. 192.


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