Ichida Sōta

Coolies tirant une voiture à bras chargée de tawara.


Commentaire

Dans cette scène rurale photographiée en extérieur, deux jeunes personnes tirent une voiture à bras (daihachiguruma 大八車) chargée de marchandises emballées dans des sacs en paille de riz (tawara 俵). Ceux-ci sont conçus pour stocker du charbon, du grain ou du riz. Un tawara rempli de riz correspond à un demi koku 1 , l'unité de mesure employée à l'époque Edo pour calculer les taxes et les revenus des seigneurs. Leurs fronts sont ceints d'une serviette nouée appelée tenugui et ils sont chaussés de waraji, des sandales en paille de riz. Le second porte une tenue habituelle d'apprenti ou de coolie, une veste courte appelée happi ayant ici un motif à damier et un pantalon de travail. Le premier, peut-être une femme, semble vêtu uniquement d'un kimono, aux pans relevés pour faciliter la marche, dévoilant ses jambes nues (une habitude courante chez les travailleurs, mais qui trouble les voyageurs occidentaux). La photographie n'étant pas instantanée, les roues du lourd chariot sont calées avec des petites pierres tandis que les jeunes coolies miment un mouvement énergique en passant devant une belle bâtisse aux toits de tuiles et aux fenêtres à claire-voie, probablement un entrepôt où ils pourraient livrer leur marchandise. La découpe inhabituelle de l'épreuve en ovale oblong, qu'affectionne beaucoup Ichida Sōta apporte une touche de raffinement à cette image documentaire.

Nous ne connaissons pas le propriétaire de cet album — qui pourrait être Émile Guimet lui-même ou l'anglo-saxon que l'on aperçoit dans un champ de thé sur une autre épreuve (cf. 10562) — mais il s'agit d'un visiteur étranger. À l'époque Bakumatsu et au début de l'ère Meiji, ceux-ci, généralement des militaires ou des marchands, s'intéressent beaucoup aux moyens de transports pour les hommes et les marchandises. Dans cet album, sur vingt-quatre épreuves nous avons cinq moyens de transports représentés : deux kago, un jinrikisha, une voiture à bras et un char à bœufs soit le cinquième de l'album 2 . Pour des raisons stratégiques, l'usage des véhicules à roues était limité et strictement réglementé par le shogounat d'Edo.

Notes

1. Un koku correspond à 180 l environ. Un champ de 10 ares produisait en moyenne 7 tarawa de riz, soit 3,5 koku.

2. Sans compter une villageoise portant un fagot sur sa tête et deux épreuves figurant des embarcations.


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